DES TRAINS "BONNET" AU "TOUR DU CANTAL"


Historique de la ligne Bort-Neussargues Les projets L'exploitation de la ligne
Les interventions du conseil municipal Les trains “Bonnet” Et maintenant ?... Le tour du Cantal en train ?  (Écrits de 1992)
Mise à jour 2002 : Le train touristique "Gentiane Express®"



HISTORIQUE DE LA LIGNE BORT-NEUSSARGUES

Lors de l'établissement des premières voies ferrées dans le Massif Central, la partie centrale du département du Cantal était bien délaissée par le rail.

Dès 1871, les parlementaires cantaliens réclamaient la réalisation d'un itinéraire de BORT à NEUSSARGUES par CONDAT et ALLANCHE. Mais ce n'est que vingt ans plus tard que le principe de cette ligne fut définitivement acquis. La déclaration d'utilité publique intervint en août 1892. A la même époque, une liaison FELLETIN -USSEL - BORT - NEUSSARGUES était étudiée. La liaison USSEL - BORT n’a jamais été réalisée vu les faibles bénéfices attendus. C'est peut-être dommage car si cette ligne avait emprunté un itinéraire autre que la vallée de la Dordogne, peut-être le "Parisien" continuerait-t-il à passer entre BORT et NEUSSARGUES.

Les parlementaires ont certes agi pour que cette desserte voie le jour mais ce sont surtout les gros intérêts économiques qui ont été déterminants. Notamment le transport des vins du Languedoc vers Paris. C'est en effet, au cours du XIX° siècle que les Parisiens, qui, jusqu'alors, ne buvaient que du vin de leur région, virent apparaître les vins du Midi (la consommation de vin de la région parisienne a, paraît-il, été multipliée par 6 entre 1840 et 1900).

Il est bon de rappeler, qu'à l'époque, la France ferroviaire était partagée en “réseaux”. Le Massif Central était desservi par le PARIS-ORLEANS (P.O.), le PARIS-LYON-MEDITERRANEE (PLM) et le MIDI. Il s'agissait là de compagnies privées qui cherchaient avant tout la rentabilité de leurs installations.

Le transport du vin apportait à chaque réseau une ressource proportionnelle au nombre de kilomètres. C'est ainsi que la ligne BORT-NEUSSARGUES qui rejoignait la ligne MONTLUÇON -EYGURANDE-BORT (terminée en 1887) a été concédée au P.O. lequel espérait créer ainsi à travers le Massif Central la liaison Nord-Sud la plus courte.

Compte tenu du relief, le tracé de cette ligne n'était pas évident. Trois projets ont été étudiés, le premier par CHAMPS, la Vallée de la Rhue, SAINT-AMANDIN, CONDAT, MARCENAT, LANDEYRAT et ALLANCHE. le second par VEBRET, MENET, RIOM, MARCHASTEL, LUGARDE, SAINT-BONNET et ALLANCHE, le troisième devait emprunter les vallées de la Rhue et de la Santoire pour aboutir à MURAT.

A l’époque, les polémiques n’ont pas manqué, les langues allaient bon train et bien entendu, le tracé avait été choisi du fait de l’influence de telle ou telle personnalité, prétendue avoir le “poids nécessaire" pour intervenir auprès de l’état et de ses réseaux de chemins de fer. En fait, les études ont été dominées par le souci de distances courtes : le tracé adopté devra être inférieur à 75,17 km pour que BEZIERS-PARIS par BORT soit inférieur aux 804 km de l’itinéraire PLM par ARVANT. Le premier tracé de 74,43 km se rapprochant trop du kilométrage litigieux a été écarté au profit du second d’une longueur de 71,300 km.
J’ai l'impression que le même phénomène se renouvelle au sujet du tracé de la nouvelle route BORT-RIOM-MURAT. Chacun ayant sa propre conviction que M. X ou M. Y a une influence prépondérante pour ce tracé. Il est rarement question ni de sa longueur, ni des difficultés techniques de réalisation.

Les difficultés de construction n’ont pas manqué, la ligne étant tracée dans des vallées fort escarpées et escaladant des hauts plateaux. Les déclivités sont comprises entre 20 % et 30 %, la partie la plus difficile à ce point de vue est comprise entre la gare d’ANTIGNAC-VEBRET ET LE COL D'EMBESSE, séparées par une dénivellation de 352 m sur une distance de 12 km.

La réalisation a exigé la construction de cinq viaducs importants dont celui de BARAJOL (entre RIOM et CONDAT) qui est un chef-d’oeuvre de maçonnerie, quatre tunnels et des courbes et rampes importantes. Il est évident que des conditions de vitesse étaient imposées aux conducteurs.

En 1925 il fallait deux heures et demi environ, pour effectuer les 71 km entre BORT et NEUSSARGUES.

Les conditions climatiques du Cézallier ont rendu difficile l’exploitation de cette ligne. Les 45 km situés au-dessus de 850 m sont souvent enneigés. Et malgré un matériel de déneigement important, quelques périodes d'interruption du trafic ont eu lieu au cours des hivers 44-45, 51-52 et plus près de nous, en décembre 1980 où des congères de 5 m de haut s’étaient formées au col de Clavières.

La ligne a été ouverte le 2 décembre 1907 de BORT à RIOM et de NEUSSARGUES à ALLANCHE. La partie centrale sera terminée en 1908 et inaugurée par le Ministre des Travaux publics le 5 juillet.

Le relief accidenté de cette région, le manque de ressources minières n’ont pas favorisé l’implantation d’industries importantes, de ce fait le trafic de marchandises a toujours été très faible (moins de 200 tonnes par jour ouvrable). Et les vins ? Et bien, ils n’y ont pratiquement jamais passé du fait des mauvaises conditions d’exploitation. Ainsi la ligne BORT-NEUSSARGUES est le type même de ligne construite artificiellement par intérêts économiques (qui n’ont pas vu le jour) étrangers à la desserte locale. 

Il faut quand même savoir que notre gare a eu une activité très importante en ce qui concerne le trafic marchandises. Notamment lorsque le PO mit en construction l'usine hydroélectrique de COINDRE sur la Rhue. Les pièces et les matériaux nécessaires à la construction ont en grande partie été acheminées par "ANTIGNAC-VEBRET".

LES INTERVENTIONS DU CONSEIL MUNICIPAL
La Compagnie d’Orléans, soucieuse d’exploiter le charbon du bassin de CHAMPAGNAC-LES-MINES, réalisa et mit en service en 1882 la ligne EYGURANDE-BORT-LARGNAC. La jonction avec MAURIAC eut lieu l’année suivante. En septembre 1893, le conseil constatant que cette ligne traverse le territoire de la commune demande qu’un arrêt ou une station soit créé à CHEYSSAC pour faciliter l’accès à BORT, prétextant, en outre, qu’il était inadmissible que la commune d’Ydes ait 3 gares rapprochées : SAIGNES, CHAMPAGNAC-LES-MINES et LARGNAC.

En novembre 1897, commencent les discussions relatives au tracé BORT-NEUSSARGUES. La commune qui avait été sollicitée, répond qu'elle ne peut contribuer, ni en argent, ni en terrain pour le passage du chemin de fer. Le mois suivant, nos élus avaient réfléchi et voyaient enfin l'intérêt de cette ligne qui suivant le méridien de PARIS serait la plus directe pour joindre la capitale à BARCELONE. Une halte est demandée à Cheyssac, et la gare au village de Drulh. Le tracé adopté, les travaux engagés, le Maire est informé du nom de notre station. Dans la séance du 16 juin 1907, il est dit : “Le Maire expose que le nom proposé pour la station est “ANTIGNAC-VEBRET”. Cette dénomination est considérée comme une déchéance pour la commune. Compte-tenu que la commune de VEBRET est plus importante que celle d’Antignac, que la station est construite sur la commune de VEBRET, il n’y a aucune raison de donner la prééminence à ANTIGNAC, le conseil émet le voeu que la station prenne le nom de “VEBRET” ou, à la rigueur, celui de “VEBRET-ANTIGNAC””. Le Ministre des Travaux Publics saisi de cette protestation n’a pas jugé bon de donner satisfaction. En fait, c'est probablement le seul cas, sur cette ligne, où la dénomination ne tient compte ni de l’implantation territoriale, ni de l’importance des communes desservies.

LES TRAINS “BONNET”.
Louis BONNET, créateur de “l’Auvergnat de Paris” a été un précurseur dans ce qui est appelé de nos jours “voyages organisés”. C’est en 1904 qu’il obtint des compagnies P.O. MIDI et PLM, des tarifs réduits pour des trains spéciaux empruntant leurs lignes. Ces réductions étaient importantes : 40 % pour un aller et retour.

Le premier train prit son départ de Paris le 21 juin 1904. A partir de BORT (par MAURIAC), il s'arrêtait à toutes les gares et la moitié des voyageurs allaient jusqu’à AURILLAC où les attendaient les “Courriers” pour MONTSALVY, ENTRAYGUES, MUR DE BARRES, SAINTE-GENEVIEVE, etc... Une billetterie spéciale avait été installée au siège de “l’Auvergnat de Paris” et deux billets gratuits étaient prévus pour les cabrettaires qui animaient le voyage. Ces trains ont eu un énorme succès, ils ont circulé jusqu’en 1939 avec une interruption pendant la première guerre.

Après les élections du “Front Populaire” et les accords sur les congés payés en 1936, ils sont devenus les trains des Vacanciers Auvergnats. Certains se souviennent de la circulation de ces trains. Ils passaient un peu avant “l’express” de Paris (la liaison Paris-Béziers s’effectuait par Bort et par Neussargues). Ils avaient, certes, un aspect un peu vieillot avec leurs wagons aux huit portières d’accès, leur marche-pied et les gros numéros indiquant les classes (beaucoup de nos compatriotes voyageaient en 3° classe avec un confort tout relatif).
Un cantalien, M. A. JACOMY, a fait appel à sa mémoire pour relater un voyage en train BONNET en 1938 (Auvergnat de Paris - Edition du Centenaire). Tout y est décrit, l’arrivée à Austerlitz, l’embarquement, les colis - notamment la valise contenant les provisions de bouches, indispensables pour “tenir le coup” pendant un peu plus de 500 km 

Ces trains facilitaient le retour au pays et contrairement aux premières générations “immigrants” qui ne revenaient qu’après de nombreuses années, souvent sans avoir pris un jour de repos. Les plus jeunes viennent “en vacances”, ce qui ne se fait pas toujours sans quelques accrochages avec parents ou amis. Car imbus de leur “supériorité de parisien”, ils s'ingénient à prendre un accent exagérément faubourien, on parle “pointu”. Je me souviens, et je ne suis pas le seul, d’un jeune, parti de son village natal (je ne dirai pas lequel) pour aller servir comme garçon de café à Paris, qui, à son retour, s'ingéniait à demander aux cabaretiers locaux des mélanges sophistiqués, étalant ainsi ses connaissances de spécialiste et espérant bien que dans ce bled, on ne puisse lui donner satisfaction. C’est d’ailleurs le même qui faisait en sorte de ne plus comprendre le patois. Mais un jour, s’étant aventuré dans un pré au moment de la fenaison, mit malencontreusement le pied sur les chevilles d’un râteau, qui, se redressant brusquement, vint le heurter violemment au visage : “Por de raster !” s'écrie notre pédant. Il venait d’un seul coup de retrouver à la fois son patois et ses racines. Ne généralisons pas, ils n’étaient pas tous comme ça.

ET MAINTENANT ? .... LE TOUR DU CANTAL EN TRAIN.

Les rares voyageurs de la commune qui ont emprunté les autorails BORT-NEUSSARGUES ont pu se rendre compte qu’il n’y avait pas foule. En matière de rendement, cette ligne était déficitaire, et la SNCF, tournée vers l’avenir et le prestige des TGV, a purement et simplement fermé la ligne ! C’est un spectacle navrant, les gares sont désertes, les rails sont rouillés, et pourtant... Mais cette “ligne à vin” traverse des paysages merveilleux, inaccessibles en voiture, pourquoi ne pas la conserver pour exploiter ce qui était “le tour du Cantal en Chemin de Fer". La configuration géographique et géologique des régions traversées est unique en France.
Sous l’impulsion de notre Maire, Marc POTTIER, une association, dont il est le président, s’est constituée pour lutter et obtenir le maintien de ce circuit (voir bulletin n°6). 


Documentation :
le journal “L’AUVERGNAT DE PARIS”
La Vie du Rail
Les archives SNCF
“Les chemins de fer du Cantal” (Antoine Trin).

 

Jean TOURNADRE.(juillet 1992)

 

Mise à jour août 2002 :

En 1993, sous l’impulsion d’un passionné du chemin de fer et de quelques bénévoles qui aiment le train, fut fondée l’association des Chemins de Fer de la Haute Auvergne.

L’association des Chemins de Fer de la Haute Auvergne exploite le train touristique « Gentiane Express® » depuis 1997.

Après cinq années d’exploitation touristique entre Riom-ès-Montagnes et Lugarde, l’association allonge son parcours jusqu’à Bort-les-Orgues en mai 2002.


Pour en savoir plus : www.gentiane-express.com

 

Mise à jour printemps 2004 (puis 2014) :  

Après une courte interruption, l'association Gentiane Express (voir leur site) a repris ses activités (sans le tronçon Bort-Riom) sur cette ligne.

Il existait un site relatant l'historique de la ligne à l'adresse suivante : http://perso.wanadoo.fr/didier.pitancier/historique_de__la_ligne.htm mais cette page n'est plus accessible (panne de serveur). Un résumé qui pouvait t être consulté à cette adresse : http://perso.wanadoo.fr/stupery/commentaires.htm n'est plus, lui non plus, disponible en 2014.. 

 

 

Dans le texte ci-dessus sont cités le charbon et les mines de Champagnac.
Un site relate l'existence d'un musée de la Mine à l'adresse suivante :
 http://perso.wanadoo.fr/mairie.champagnac/musee.htm 

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